Au cours des derniers mois, plusieurs vulnérabilités majeures affectant la majorité des processeurs disponibles sur le marché ont été découvertes. Elles affectent surtout les processeurs du fondeur US Intel ainsi que certaines puces conçues par ARM et IBM, mais aussi, dans une moindre mesure cela dit, les CPU produits par AMD. Il a été démontré que certaines d’entre elles existent même depuis près de 20 ans.
Les plus connues parmi ces vulnérabilités sont très probablement : Meltdown, Spectre, BranchScope, Foreshadow et TLBleed. Ces exploits permettraient à un attaquant de détourner différents types de données (mots de passe, clés cryptographiques…) sur un système sans être détecté ou arrêté par les outils de sécurité traditionnels. Les processeurs produits par Intel sont presque toujours les plus sensibles ou les seuls concernés par ces exploits.
Une nouvelle étude conduite par des chercheurs des universités de Technologie de Tampere et de La Havane (respectivement en Finlande et à Cuba) a démontré que les processeurs Intel sont sujets à une nouvelle attaque par canal latéral, baptisée PortSmash, qui permet d’exfiltrer l’information des processus se déroulant en parallèle sur un même noyau physique.
Pour être plus précis, PortSmash permet à un attaquant d’exécuter un processus malveillant à côté des processus légitimes en utilisant les capacités d’exécution de threads parallèles de l’architecture et d’exfiltrer les données des processus légitimes s’exécutant sur le même noyau.
« Nous avons récemment découvert un nouveau vecteur d’attaque de microarchitecture CPU », ont écrit les chercheurs.
Cette nouvelle vulnérabilité matérielle critique exploite le SMT (Simultaneous Multi Threading), une technologie orientée multitâche qui permet d’exécuter plusieurs threads de calcul en parallèle sur un noyau de CPU. Or la technologie communément appelée Hyperthreading développée par Intel qui se rencontre sur de nombreux processeurs modernes n’est qu’une implémentation du SMT permettant d’activer deux cœurs logiques pour chaque cœur physique disponible sur un die. L’Hyperthreading permet ainsi d’exécuter deux instances simultanément d’un même programme ou de deux programmes différents en utilisant au mieux les ressources du processeur.
Les chercheurs ont vérifié l’exploit sur les processeurs Intel des générations Skylake et Kaby Lake. Ils ont néanmoins suggéré que tous les processeurs qui ont bénéficié de l’implémentation du SMT dans leur architecture devraient être concernés par PortSmash. Ils suspectent fortement les puces AMD d’être également touchées par cette nouvelle vulnérabilité.
Paul Kocher, l’expert en sécurité cryptographique qui a découvert Spectre, a souligné que l’un des facteurs essentiels qui contribuent à faire de PortSmash une découverte aussi inquiétante est lié à la façon dont OpenSSL effectue des opérations sensibles en utilisant des instructions de branchement qui sont basées sur des valeurs secrètes.
L’équipe de recherche a suggéré de désactiver la fonctionnalité SMT ou Hyperthreading au niveau du bios et de faire une mise à jour d’OpenSSL, idéalement vers OpenSSL 1.1.1.1 ou toute autre version supérieure ou égale à OpenSSL 1.1.0i, à titre de corrections potentielles.
Cette découverte est l’un des premiers résultats du programme de recherche « SCARE : Side-Channel Aware Engineering » financé par le Conseil européen de la recherche, dont l’objectif est de trouver et d’atténuer les nouvelles attaques par canal latéral. PortSmash est la seconde vulnérabilité matérielle majeure qui cible la fonctionnalité Hyperthreading des processeurs Intel, après l’annonce de TLBleed en juin dernier.
Les chercheurs ont récemment rendu publique leur découverte sous la référence CVE-2018-5407 et Intel a été informée de cette vulnérabilité le mois dernier, mais n’a pas encore réagi à cette nouvelle attaque ni fait part d’éventuelles corrections envisageables.
Source : WccfTech