La Russie a une arme secrète pour déstabiliser l’Ukraine : les fake news. Depuis les prémices du conflit, la propagande russe s’appuie sur des campagnes de désinformation pour tenter d’influer sur l’issue de la guerre…
Ksenia Iliuk, fondatrice de LetsData, une société qui se sert de l’intelligence artificielle pour lutter contre la désinformation, a consacré une conférence à la propagande russe en Ukraine à la fin du mois dernier. Celle-ci a été organisée dans le cadre de CyberSec Europe, un événement consacré à la cybersécurité organisé à Bruxelles.
D’après la cofondatrice de la start-up, les premiers signes d’une invasion russe en Ukraine étaient visibles en ligne… dès septembre 2021, soit cinq mois avant l’incursion de l’armée. Vladimir Poutine, président de la Russie, a en effet annoncé « une opération militaire spéciale » en Ukraine à la fin de février 2022.
« Le premier indicateur d’une invasion russe dans nos données remonte à septembre 2021, et c’était des campagnes de fausses informations qui se sont intensifiées tout à coup et ont été multipliées par dix », explique Ksenia Iliuk.
Les fake news, l’arme secrète de la Russie
En analysant les données disponibles sur la toile, LetsData a découvert que la Russie préparait ses opérations militaires contre l’Ukraine, ainsi que ses cyberattaques, avec des campagnes de désinformation en ligne. En clair, Moscou cherche à déstabiliser l’ennemi en amont en diffusant des fake news. Ces fausses informations cherchent à provoquer des mouvements de panique parmi la population ukrainienne, en sapant la confiance dans les autorités du pays, menées par Volodymyr Zelensky.
« Les fake news affectent le comportement des citoyens et des gens », explique Ksenia Iliuk.
Lors de sa présentation, Ksenia Iliuk a mis en avant plusieurs cas concrets. Bien avant l’incursion russe sur le sol ennemi, Moscou a notamment diligenté une campagne de fake news affirmant que les « Ukrainiens sont des nazis ». Cette information a été massivement poussée « dans les pays d’Europe » en amont de l’invasion, en partie sur des chaînes Telegram. Cette tactique visait à empêcher les populations européennes de se ranger du côté de l’Ukraine lors de l’attaque.
L’exemple des pannes d’électricité
Un autre exemple évoqué par Ksenia Iliuk est celui des pannes d’électricité. À partir d’octobre 2022, la Russie a « poussé l’idée que les Ukrainiens n’ont plus d’électricité, et qu’elle est réservée aux oligarques ». En inondant Internet « de faux sites, de faux documents », les responsables de la propagande ont instillé le fait que tous les Ukrainiens allaient se retrouver privés d’électricité… mais que les plus riches, protégés par le gouvernement, allaient être épargnés.
Quelques semaines plus tard, l’armée russe a frappé les sites de production électrique à l’aide de missiles. Le réseau d’approvisionnement en eau a également souffert à ce moment-là. À la suite de plusieurs frappes massives, quatre millions d’Ukrainiens ont effectivement été privés de courant, alors que l’hiver approchait à grands pas. Comme l’explique Ksenia Iliuk, les campagnes de désinformation sont intrinsèquement liées aux opérations militaires, particulièrement contre les civils.
« Chaque campagne est orchestrée avec un début et une fin, à la manière d’un film », souligne la fondatrice de LetsData.
En parallèle des tirs de missiles, la propagande cherchait à provoquer la colère de la population. D’après LetsData, « des messages relayés en masse sur Facebook, WhatsApp et Telegram » encourageaient les Ukrainiens à se révolter contre le gouvernement Zelensky. Ces messages continuaient de propager l’idée que certains individus, plus aisés, avaient toujours de l’électricité. Les messages recommandaient de descendre dans la rue pour se faire entendre des autorités.
Heureusement, les Ukrainiens ne sont pas tombés dans le piège. Alors que le gouvernement démentait fermement les rumeurs, des erreurs grossières ont été repérées dans la propagande organisée par Moscou. En effet, les responsables ont utilisé Google Traduction pour rédiger les messages en ukrainien à partir du russe. La conversion a donné lieu à plusieurs bizarreries linguistiques, qui ont réduit l’efficacité de la campagne…
source : 01net